Août 95 – Au crépuscule d’une nouvelle vie.

« Petite étoile. Ca fait longtemps que je ne t’ai plus dit mes problèmes. Pas que je n’en avais plus envie, que tu ne m’étais plus digne de confiance mais disons, que j’en avais assez de me morfondre tu sais, de te faire pitié, j’avais honte. Je suis fatiguée. Il y a deux semaines environs, mes parents m’ont chassée de la maison. Depuis, j’essaie de me rendre utile à des gens pour qu’ils me donnent une pièce pour trouver à manger. Mais ça marche pas beaucoup petite étoile. Maman pleurait quand elle regardait mon père me jeter dehors. Et papa il criait tout plein : «  Par malheur pourquoi une fille ? Je suis un lâche. Je n’ai pas le courage de te faire disparaître ! Alors va-t-en ! » Ca veut dire quoi tu penses ? Qu’il voulait que je sois morte ? J’ai que neuf ans, je peux pas tout savoir moi. Pourquoi je suis une fille ? Pourquoi ils veulent pas de moi ? J’ai été méchante ? Même les personnes pour qui j’essaye de travailler me chassent. Je dois pas être une bonne fille pour qu’on veuille pas de moi… Mais tu sais petite étoile, moi je veux pas mourir et pourtant je meurs de faim, mon bidon me fait mal et j’ai de moins en moins de force. Personne ne veut m’aider et toi, même si tu es gentille, je sais que tu peux rien faire pour moi. Tu éclaires déjà mon chemin la nuit et je t’en suis reconnaissante pour ça. Je dois te laisser petite étoile, je ne devrais pas être là en ce moment. J’ai volé des pouces à un marchand et je crois qu’il vient de me repérer. Porte-toi bien petite étoile. »

Janvier 1996 – Départ

« Petite étoile, mes larmes sont gelées sur mes joues. Je suis entrain de revivre. C’est ce que monsieur Yang dit. Là, il vient de finir de me raconter une histoire. Je me sentais mal à cause de la mer alors il m’a raconté un joli conte de fée pour que j’aille mieux. Je suis encore toute engourdie… Monsieur Guo m’a trouvée alors que je me transformais en glaçon au bord de la route. Personne ne voulait de moi, mais lui il m’a tendu sa main et il m’a promis que si je le suivais, j’aurais une belle vie. J’ai eu peur tu sais, mais quand il a sourit, j’ai pleuré tout plein et j’ai pris sa main. Là on est dans le bateau qui nous amène en Corée du Sud. Monsieur Guo m’a dit que j’irais à l’école et que dès que j’aurais mis un pied sur terre, je serai sa fille. Moi ça m’a fait trop plaisir d’avoir un papa qui m’aimerait alors j’ai accepté. Je veux dormir alors je te laisse petite étoile. Porte-toi bien ! »



Juillet 2001 – Anniversaire

« Petite étoile ! Ca fait tellement longtemps que je ne t’ai plus parlé. Je me sens un peu honteuse à quinze ans de raconter ma vie à une étoile, mais si ça peut me faire du bien, pourquoi ne le ferais-je pas ? Après, je n’ai pas de problème tu sais. Je veux juste que tu saches comment je me porte. Une fois que je sois arrivée en Corée, mon père m’a tout de suite mise dans le bain. C’est un mafieux, ni mal ni bien placé ; juste comme il le faut. J’ai jamais eu peur de cette révélation à vrai dire. J’acceptais mon sauveur comme il l’était et j’ai même accepté de travailler pour cette organisation il y a environs un an. Les jeunes se débauchent de plus en plus jeune disent les collègues de mon père, alors il me suffisait simplement de faire l’intermédiaire entre dealer et acheteur. Je ne me suis pas encore fait prendre, et je fais en sorte que cela n’arrive jamais. Puis aussi, je suis pas mal douée à l’école. C’est pas en Chine que j’aurais fais des fureurs ! J’ai pris le nom de mon père. Désormais, je suis Guo Daiyu, fille de Guo Xiang Lun, fils de Guo Chiu et Lim Jun Hee. Mes grands-parents sont encore en vie, et je passe parfois leur rendre visite. Même s’ils ne savent pas comment leur fils m’a véritablement eu – pour eux je suis une fille d’une de ses ex – et donc leur seule petite-fille adorée. J’en profite pas mal je l’avoue. Je dois y aller, mon père m’appelle. Porte-toi bien petite étoile. »


2013 – Présent
« Pe… Petite étoile – Ah que j’étais niaise sérieusement ! Ca fait 12 ans que je ne t’ai plus donné de nouvelles, faut le faire n’est-ce pas ? Mes grands-parents sont morts suite à un règlement de compte qui visait mon père. J’avais 17 ans et il a juste eu le temps de me cacher qu’ils se sont faits assassinés. Mon père a vite retrouvé les criminels et leur a fait payer. Mais c’était trop tard, le mal était fait. Il ne s’en ai jamais vraiment remis. Mon père est d’un naturel doux et familial, loyal et affectueux, alors la mort de ses parents l’a énormément affecté. C’est pour cela que je l’ai deux fois plus à dos depuis, même si j’ai vingt-sept ans, c’est toujours le cas. Ce règlement de compte a été jugé comme une erreur commise de sa part, une mission qu’il n’a pas su gérer correctement. Par conséquent, il a été rétrogradé, de peu, mais au moins il n’a pas été tué. Il s’est lâché sur moi alors, cela ne m’a pas dérangé et je sais comment le rendre fière du coup. Il aspire à ce que je puisse vivre sans craintes d’être oppressée par le système hiérarchique et souhaite alors que je gravisse les échelons, que j’arrive là où il n’a jamais posé pieds. C’est déjà un peu le cas mais je ne compte pas m’arrêter là. Je veux lui en mettre plein la vue et j’y travaille depuis que je suis entrée dans la mafia. J’ai monté les échelons un à un et bientôt ça serait trois par trois et ainsi de suite. J’ai un rêve en parallèle, qui s’est développé depuis mon adolescence, mais je m’y suis résout à ne pas le réaliser. J’aime la mode, j’en suis passionnée, j’aimerais dessiner et créer des vêtements. Seulement, grâce à mon père, je suis encore de ce monde à l’heure qu’il est, je sacrifie donc mon rêve pour que le sien se réalise. Petite étoile, je pense que je ne viendrai pas à toi avant l’heure de ma mort, j’aurais pleins de choses à te dire, et je le ferai quand je te rejoindrai. Entre-temps, porte-toi bien ! »